LES CRAMÉS DE LA BOBINE

Le plus beau des combats

lundi 14 décembre 2009 par Claude

Vendredi 11 avril, le MRAP, Alticiné et les Cramés ont proposé une soirée enrichissante, animée par Michelle Chabrol, autour du racisme dans le sport, en présence d’intervenants politiques et associatifs : un maire adjoint chargé du sport et des discriminations à Paris dans le 12ème arrondissement, le responsable de l’USMM - entraîneur de rugby, Serge Chabrol, secrétaire national du SNEP -FSU et professeur d’EPS et l’athlète international Salim Sdiri. Le débat a été lancé par la diffusion du drame américain "Le Plus beau des combats" - "Remember the Titans" - sorti en avril 2001. Ce film a été réalisé par Boaz Yakin avec Denzel Washington, Will Patton et Wood Harris. En 1971, dans la petite ville d’Alexandria, en Virginie, la population noire se retrouve intégrée au sein du lycée T.C. Williams jusque-là réservé aux Blancs. Mais les oppositions sont violentes.
Dans une situation instable qui menace de dégénérer à tout moment, Herman Boone (Denzel Washington), un Noir, est nommé entraîneur principal de l’équipe des Titans. A ce poste, il devient le supérieur de Bill Yoast (Will Patton), un Blanc, un prédécesseur renommé.
Malgré tout ce qui les oppose, Boone et Yoast apprennent à travailler ensemble et découvrent qu’ils ont davantage en commun que le seul amour du football. Tous deux partagent intégrité, sens de l’honneur et une solide éthique de travail.
Bien qu’ayant des origines radicalement différentes, ils parviennent à transformer un groupe de jeunes gens haineux, divisés et incapables de se concentrer en une équipe soudée, volontaire et dynamique. Au-delà des matches et des victoires, ce sont les préjugés et l’intolérance que les deux hommes combattent.

Le film est prenant, dramatique à souhait. Il est significatif qu’il faille parfois l’intervention de la loi pour faire bouger les mentalités, en l’occurrence celle qui, en 1971, aux USA, oblige au mélange racial dans le sport scolaire. Dès lors, l’action du film est plus psychologique que factuelle, car tous les événements (heurts dans un car, pierre jetée contre la maison de l’entraîneur noir Boone, propos et magouilles racistes d’un entraîneur blanc...) sont autant d’épreuves mentales pour un vrai travail sur ses préjugés. A l’instar de Yoast, l’entraîneur blanc, qui surmonte son racisme initial et son dépit de se voir marginalisé, au service d’un Noir, pour s’incliner devant l’acharnement et le professionnalisme de son chef et rival, il faut parfois partir de très loin pour aller loin ! Car, enfin, on peut être désarçonné par la violence du football américain, où les joueurs sont de simples pions (aujourd’hui téléguidés par... ordinateur !), où l’entraîneur noir, hurlant et autoritariste, est paradoxalement freiné par son collaborateur blanc qui lui conseille de laisser boire ses garçons - surenchère et forfanterie de virilité et d’écrasement, voire de haine de l’adversaire qu’il faut battre à tout prix au nom de la performance et du championnat ! Justement - remarque Serge Chabrol - cette situation extrême de violence physique et verbale permanente sert paradoxalement le propos du film : la solidarité et l’amour qui unissent finalement ces lycéens n’en sont que plus forts. Le pari impossible a été gagné ! Face à une équipe exclusivement blanche que rencontrent les Titans, Boone tient un beau discours : "nous sommes plus forts qu’eux car nous sommes Blancs et Noirs, nous sommes métissés !!" D’où le titre de "long combat" à mener contre les autres, les racistes mais aussi, pour un Yoast, contre ses propres préjugés ! On pense à la scène où Boon, inversant les rôles, jette une banane à l’entraîneur blanc qui l’avait traité de "macaque"...
* * *
Les intervenants ont bien pointé, au-delà du racisme, les différentes formes de discrimination, illustrées par de récentes statistiques du MRAP : antisémitisme, sexisme, voire rivalités de clochers - entre clubs voisins, rappelle Slalim Sdiri non sans malice. Le problème du racisme et de l’intolérance est global et c’est peut-être la faiblesse du film de ne guère prendre en compte les problèmes sociaux dans la ville d’Alexandria, de ne pas assez montrer les racines du mal dans les quartiers, dans la répartition du tissu urbain - se contentant de figures emblématiques mais parfois caricaturales. Le parti-pris de se concentrer uniquement sur le sport se justifie toutefois symboliquement comme dramatiquement : l’acrtivité physique exalte les valeurs de solidarité, voire de fraternité - et rien n’est plus structurant quand on vit dans la misère ou qu’on connaît des difficultés psychologiques : on doit respecter des règles, des horaires d’entraînement, faire preuve de régularité et de loyauté -même si, de nos jours, le sport de haut niveau offre parfois l’image du dopage, de la violence des supporters ou de la triche en tout genre. Le sport permet de se dépasser, comme ce jeune qui a eu un accident lors d’un match, le poignet et le dos brisés - et qui se retrouvera en chaise roulante, ce qui ne l’empêchera pas de disputer les championnats handisports et de remporter des médailles.

Enfin ont été abordés le revers de l’intégration sportive des minorités - le communautarisme - et le racisme à rebours que pratiquent parfois certaines à notre égard : ainsi doit-on accepter, voire financer sur les deniers publics, comme à Bradford en Angleterre avec des clubs de Pakistanais Sikhs ou en Gâtinais les Turcs ou Portugais de Châlettte, des structures qui pratiquent le repli identitaire et qui ne semblent pas toujours prêtes à mener le "plus beau des combats" ?
Claude


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